La puissance de calcul des algorithmes du big data et la capacité à récolter des données en masse amène de grandes promesses. L’une de celles-ci est d’améliorer la santé des individus par le biais de l’adoption de dispositifs de captation permettant la mesure de la fréquence des battements de cœur, du nombre de pas effectués dans une journée, du nombre d’heures resté debout ou assis, etc., et bientôt du taux de sucre dans le sang et de la pression sanguine. Ces données permettraient un empowerment du sujet alors capable (et se devant) désormais de prendre sa santé en main, mais aussi un meilleur suivi par les professionnels de la santé.
Si les applications existantes et prévues sont inévitablement intéressantes, elles amènent nombre de questionnements et d’enjeux éthiques d’importance. La protection de la vie privée, bien sûr, mais aussi la remise en question d’un des piliers principaux de la solidarité sociale, le système d’assurance maladie, pourtant censé garantir un accès aux soins de façon équitable à toutes et à tous de façon inconditionnelle. Dans un climat d’austérité budgétaire, les ambitions de la gouvernance libérale font écho à un discours de sur-responsabilisation individuelle. Pourquoi devrais-je payer pour ma voisine qui fume et qui mange n’importe quoi alors que moi je fais attention ? Mais ce sont aussi les métiers de la santé qui risquent de faire les frais de l’accroissement d’un pouvoir technocratique renforcé par le fait que les dépositaires et les exploitants de données, le plus souvent des géants de l’internet ou des grosses entreprises privées, poursuivent également d’autres intérêts. Ce sont ces enjeux que j’ai discuté ce jour à l’occasion de la conférence que j’ai donnée au sein du Regroupement stratégique de recherche sur les TIC et la santé de l’Université du Québec à Montréal et du Réseau de recherche en santé des populations du Québec, au travers d’exemples empiriques et de théories classiques remises au goût du jour. Enregistrement de la conférence bientôt disponible.