Nous sommes désormais tous d’accord : avec la numérisation, notre monde a changé, malgré une indiscutable continuité. Bien que reposant plus que jamais sur un modèle capitaliste qui ne date certes pas d’hier, il a changé dans sa façon de fonctionner, mais aussi de penser et de se penser. Malgré ce consensus qui s’impose face aux faits, il reste difficile de désigner un concept fédérateur qui ne soit pas traversé par des enjeux de pouvoir sérieux, notamment commerciaux. Le concept du « big data », issu des milieux technologiques, est probablement le plus dominant, mais il n’a jamais été neutre ni scientifique. Big data, humanités digitales ou numériques, société du savoir, révolution de l’Internet, révolution numérique, disruption numérique, capitalisme informationnel, capitalisme cognitif, société de surveillance… avec quel concept les chercheurs en sciences sociales peuvent-ils alors travailler ?

Dans Les mots et les choses (1966), Michel Foucault historicise le savoir et propose d’étudier son développement (tout sauf linéaire) depuis l’âge préclassique jusqu’à la modernité, autour du concept d’épistémè. Malgré la grande complexité de ce qui est sans doute le texte le plus dense du philosophe, Lire la suite →